Chaque année, des millions de filles subissent des préjudices physiques et émotionnels, au vu et au su de leur famille, de leurs amis et de leur communauté, et avec leur assentiment, révèle l’État de la population mondiale 2020, publié aujourd’hui par l’UNFPA, l’organisme des Nations Unies chargé des questions de santé sexuelle et reproductive.
Du repassage des seins aux tests de virginité, au moins 19 pratiques néfastes sont considérées comme des violations des droits fondamentaux selon ce rapport de l’UNFPA, qui se concentre sur les trois pratiques les plus répandues : les mutilations génitales féminines, le mariage des enfants et la préférence marquée pour les garçons au détriment des filles.
« Les pratiques néfastes à l’égard des filles provoquent des traumatismes profonds et indélébiles, qui les privent de leur droit à réaliser leur plein potentiel », a déclaré le Dr Natalia Kanem, Directrice exécutive de l’UNFPA.
Cette année, 4,1 millions de filles risquent d’être victimes de mutilations génitales féminines. Aujourd’hui, 33 000 filles de moins de 18 ans seront mariées de force, souvent à des hommes beaucoup plus âgés qu’elles. Par ailleurs, dans certains pays, la préférence marquée des garçons au détriment des filles peut donner lieu à une sélection prénatale en fonction du sexe ou à une négligence extrême des enfants de sexe féminin, allant jusqu’à causer leur mort. On estime qu’il manque plus de 140 millions de femmes à travers le monde à cause de ces pratiques.
Certaines pratiques néfastes sont en recul dans les pays où elles étaient les plus répandues. Pourtant, en raison de la croissance démographique de ces pays, le nombre de filles qui en sont victimes risque de fait d’augmenter au cours des prochaines décennies si aucune mesure n’est prise d’urgence.
Les pays qui ont ratifié les traités internationaux tels que la Convention relative aux droits de l’enfant ont le devoir de mettre un terme à ces pratiques, qu’elles soient le fait de membres de la famille, de communautés religieuses, de prestataires de soins de santé, d’entreprises commerciales ou d’institutions publiques. Beaucoup ont adopté des lois pour les interdire, mais ce n’est pas suffisant.
Les dizaines d’années d’expérience et de recherche montrent que des approches ascendantes menées à l’échelle locale sont plus à même de faire changer les choses, indique le rapport de l’UNFPA. « Nous devons prendre le problème à la racine en nous attaquant à ses causes profondes, notamment aux normes sexistes. Nous devons soutenir davantage les communautés qui s’efforcent de comprendre les conséquences de telles pratiques sur les filles et les bénéfices qui rejaillissent sur toute la société lorsque ces préjudices disparaissent », a déclaré le Dr Natalia Kanem.
Le rapport ajoute que les systèmes économiques et juridiques favorables doivent être restructurés pour garantir à toutes les femmes l’égalité des chances. Modifier la législation relative aux droits de succession, par exemple, peut éliminer l’une des principales raisons qui poussent les familles à favoriser les garçons au détriment des filles, et contribuer à mettre fin au mariage des enfants.
Il est possible de mettre un terme au mariage des enfants et aux mutilations génitales féminines dans tous les pays d’ici dix ans à condition d’intensifier les efforts déployés pour prolonger la scolarisation des filles, leur enseigner des compétences de la vie courante et impliquer les hommes et les garçons dans ces changements sociaux. Le rapport montre qu’un investissement de 3,4 milliards de dollars par an, en moyenne, entre 2020 et 2030, permettrait de mettre fin à ces deux pratiques et, ainsi, aux souffrances de quelque 84 millions de filles.
Bien que certaines pratiques néfastes soient en recul dans plusieurs pays du monde, la pandémie de COVID-19 pourrait changer la donne. Une analyse récente a révélé que si les services et les programmes existants étaient interrompus pendant six mois, 13 millions de filles supplémentaires pourraient être mariées de force et 2 millions d’autres pourraient subir des mutilations génitales féminines d’ici à 2030.
« La pandémie rend notre travail plus difficile et plus pressant, car beaucoup plus de filles risquent d’être victimes de ces pratiques aujourd’hui, précise le Dr Natalia Kanem. Nous ne relâcherons pas nos efforts tant que toutes les filles ne seront pas pleinement maîtresses de leurs droits, de leurs choix et de leurs corps. »
Cette publication a été initialement publiée ici